L’immeuble dans lequel est établi un débit de boisson est souvent donné en location par une brasserie ou par un négoce de bières, lesquels, en plus de percevoir un loyer, imposent la vente exclusive (et souvent d’un volume minimal) de leurs produits. Généralement, le sort du bail est contractuellement lié à ces obligations, ce qui signifie que leur non-respect peut conduire à la résiliation du bail aux torts de l’exploitant.
Cette pratique de ce que nous appellerons par facilité les « clauses d’achat » place l’exploitant en position délicate : au départ, il peut difficilement négocier les conditions et à l’arrivée, il supporte le risque de perdre ses investissements et son gagne-pain du jour au lendemain.
Pour remédier à ces problèmes, un code de bonne conduite a été adopté en 2015. Même s’il est intéressant, ce code de bonne conduite n’est toutefois pas suffisant et est parfois difficile à appliquer en pratique.
Dès lors, deux parlementaires ont récemment déposé une proposition de loi visant à ajouter au Code civil un article interdisant « toute clause qui donne au bailleur le droit de mettre fin au bail pour non-respect d’une quelconque obligation d’achat, sauf dans le cas où ce non-respect serait imputable au manquement grave et délibéré du preneur ».
La résiliation du bail pour méconnaissance d’une clause d’achat ne serait donc plus possible, sauf en cas de manquement grave et délibéré à cette obligation. Du reste, étant introduite dans le Code civil cette fois, la protection s’appliquerait à tous les contrats de bail, et non plus seulement aux cafetiers (notamment les jeux de hasard).
Le texte de la proposition n’interdit toutefois pas de prévoir contractuellement d’autres sanctions que la résiliation en cas de non-respect d’une obligation d’achat.
En réalité, le Règlement européen 1984/83, qui s’impose à la Belgique, prévoit clairement qu’il est possible d’intégrer des clauses d’achat dans le contrat. Interdire purement et simplement ces clauses semble donc difficile, vu le droit européen.
Le législateur belge choisit donc d’interdire les sanctions potentiellement disproportionnées de ces clauses, ce qui semble être une voie intéressante dans la marge de manœuvre dont il dispose.
Le risque de l’aggravation des autres sanctions (en particulier les amendes) est également envisagé par le législateur belge qui précise que ces amendes ne peuvent avoir qu’une portée indemnitaire pour le fournisseur, et non punitive pour le cafetier.
En définitive, cette initiative des parlementaires n’est certes pas la panacée pour protéger les cafetiers-locataires, mais est néanmoins un pas dans la bonne direction.
Gageons que cette proposition de loi sera votée rapidement, puis appliquée dans la pratique.